Alors dites-moi, qui êtes-vous?

Ah! les cinq à sept… Qui oserait les bouder? La question ne se pose même pas; il est évident qu’on souhaite être de la partie. D’ailleurs, ils sont si tendance qu’on a effectivement tendance à parler un peu trop de soi ou plutôt de ce que l’on fait.

 
Eh oui, après avoir échangé nos noms et origines tout en sirotant notre verre de rosé, on passera en revue les épisodes de pluie ou d’ensoleillement des derniers jours, la hausse du prix de l’essence et tout ce qui pourrait éveiller notre mécontentement. Puis on nous demandera si l’on est venu seul ou accompagné et ne sachant plus quoi dire, on soulèvera la question tant redoutée. Pourquoi redoutée? Parce que celle-ci va nous définir pour de bon.
 
« Au fait, vous ne m’avez pas dit ce que vous faisiez dans la vie? »
 
La riposte ne se fera pas attendre, car la réponse est simple : « Pour tout vous dire, je fais mon possible. »

Bon, je l’avoue : j’adore voir la tête que font les gens à ce moment! Le petit rire crispé servira à maquiller le silence sur le point de trahir leur étonnement, et quelque peu vexés — car au fond on vient de faire une sacrée entaille au protocole de communication — ils enchaîneront avec une question ne laissant planer aucun doute sur la réponse attendue:
 
« Sans blagues, que faites-vous pour gagner votre vie? »
 
Ne leur en déplaise, j’ai beau tourner la langue sept fois dans ma bouche, ça m’échappe: «Excusez-moi, je ne savais pas qu’il y avait un tirage. Dites-moi tout de suite où je dois acheter les billets, car j’aimerais bien gagner! Ah ça oui!»
 
En général, c’est à ce moment que les gens éclatent d’un rire franc et honnête. Ils viennent de réaliser que je n’ai nullement l’intention de parler de mon métier, et ce, pour deux raisons :
 
a) Dès l’instant où l'on parle de son métier, les gens ne vont pas plus loin dans leur raisonnement. Bref, ils ne creusent plus. Ils se contentent de ce qu’il y a à la surface. (Ben oui, nous voilà avec une belle grosse étiquette comme celle que l’on retrouve sur les bananes à 0.69$ le kilo). Ils ne marchanderont pas à savoir si l’on vaut plus ou moins. Et peu importe ce que l’on dira, l’étiquette aura prépondérance sur tout le reste…
 
b) Et enfin, ce n’est pas notre métier qui nous définit, mais bien nos rêves et nos passions.
 
Évidemment, je ne laisse pas le silence perdurer, car j’aime réseauter. Alors je leur adresse les questions suivantes : « Quels sont vos rêves, vos passions, vos passe-temps? Qu’est-ce qui vous nourrit, vous allume, vous enthousiasme? Qu’est-ce qui vous occupe tellement l’esprit que vous en oubliez le temps qui passe? Et si vous aviez entre les mains la lampe contenant un génie désireux d’exaucer trois souhaits, quel serait celui que vous aimeriez voir se réaliser en premier?
 
Ouf! Je sais, c’est beaucoup de questions. Cependant, j’obtiens des réponses incroyables. Les gens rêvent en petit, en grand, mais une chose est sûre : ils rêvent. Ils veulent plus et mieux, aspirant à une existence différente, palpitante et libre de contraintes. Ils ont quelque chose à faire, à vivre, à réaliser, à tenter avant de franchir  la ligne d’arrivée.
 
Honnêtement, ça change des cinq à sept habituels, croyez-moi.
 
Je vous invite à escamoter la formule traditionnelle qui souvent, selon la réponse, vous exclura involontairement d’un sujet que vous ne maîtrisez pas, et tentez plutôt l’expérience; vous verrez, vos questions deviendront un véritable trousseau de clefs capable d’ouvrir le cœur et de libérer les rêves modestes, parfois ambitieux, de gens peu ordinaires.
 
Et vous, qui êtes-vous?
 
Prenez tout votre temps pour y penser; le prochain cinq à sept n’est pas pour demain.
 
Bonne semaine tout monde!
 
Jocelyne Gagné (alias Mésange)
 
P.-S. Je suis tellement heureuse de vous retrouver :-)

4 commentaires:

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